Lu en octobre 2018… Je continue d’essayer de rattraper mon retard !
Si le début de ce livre ne m’a pas rendue euphorique, toute l’histoire commence à compter de la page 119 selon moi.
Patricia Highsmith n’est pas qu’une ombre servant de référence. Véritable personnage de l’histoire à part entière, elle entraîne l’auteur et le lecteur dans un docu-fiction intrigant, dans une histoire assez perverse, psychologique à souhait où on nage continuellement entre deux eaux volontairement obscures.
L’écrivain n’est pas sans malmener son lecteur. Jill Dawson joue en effet sur les deux tableaux et elle interroge entre les lignes sur le processus créatif.
Je qualifierai donc cette vraie/fausse bio, ce vrai/faux thriller de subtil et d’ambigu. Le lecteur peut s’y perdre mais personnellement je salue l’originalité du livre.
« Lorsque, au milieu des années 1960, la romancière Patricia Highsmith s’installe dans un petit cottage dans le Suffolk, en Angleterre, c’est pour s’isoler et se donner le temps d’écrire, mais également pour protéger son intimité : elle entretient en effet une liaison avec Sam, une femme mariée qui vit à Londres. Cependant Patricia est convaincue que quelqu’un l’observe, la surveille, et cette sensation ne fait qu’augmenter avec l’arrivée d’une jeune journaliste qui multiplie les intrusions dans le sanctuaire où elle espérait trouver la quiétude. Lorsque Sam vient la rejoindre pour une escapade amoureuse, les choses ne tardent pas à tourner au drame? Ironie suprême, la grande Patricia Highsmith, qui excelle dans l’art de raconter des histoires de meurtre et de violence, ne serait-elle pas en train de devenir l’héroïne de ses romans d’angoisse ? »
J’ai lu ce roman en août 2018 et je ne vous en parle que maintenant… Mieux vaut tard que jamais !
Journal de bord d’un libraire d’une bourgade du Sud-Ouest de l’Ecosse , ces lignes sont une lecture jubilatoire où les pépites des clients vous feront rire aux éclats (si vous appréciez comme il se doit l’humour anglais of course!).
La vie des libraires est très bien décrite ainsi que les coulisses, l’envers du décor (non non non, ces derniers ne passent pas leurs journées à lire contrairement à ce que peuvent penser des générations de dévoreurs d’encre fraîche ou vieillie).
L’écrivain nous convie également à réfléchir sur ce que sont les vrais lecteurs, les best-sellers, le succès et j’en passe.
Les pages de ce premier roman fleurent bon l’atmosphère so british que j’aime tant, la passion du papier, les mots… et nous offrent de bons conseils littéraires au passage.
« Les vrais lecteurs sont rares, même si une multitude de gens se considèrent comme tels. »
« A mesure que le succès et la renommée d’un auteur s’accroissent, le tirage de ses ouvrages augmentent également. »
« Les recueils de poésie sont autant de possibles qui, un jour peut-être, seront déterrés et soigneusement époussetés par des paléontologues de la Littérature »
« Bienvenue à Wigtown, charmante petite bourgade du sud-ouest de l’Écosse. Wigtown, son pub, son église… et sa librairie – la plus grande librairie de livres d’occasion du pays. De la bible reliée du XVIe siècle au dernier volume d’Harry Potter, on trouve tout sur les kilomètres d’étagères de ce paradis des amoureux des livres. Enfin, paradis, il faut le dire vite…
Avec un humour tout britannique, Shaun Bythell, bibliophile, misanthrope et propriétaire des lieux, nous invite à découvrir les tribulations de sa vie de libraire. On y croise des clients excentriques, voire franchement désagréables, Nicky, employée fantasque qui n’en fait qu’à sa tête, mais aussi M. Deacon, délicieux octogénaire qui se refuse à commander ses livres sur Amazon.
Entre 84, Charing Cross Road d’Helene Hanff et Quand j’étais libraire de George Orwell, Le Libraire de Wigtown invite le lecteur à découvrir l’envers du décor : si l’amour de la littérature est primordial pour exercer le métier de libraire, on y apprend qu’il faut aussi un dos en béton et une patience de saint! »
C’est La Thé Box qui m’a offert ce premier opus lors d’un Tea Time so british il y a plusieurs mois…
Ma PAL (pile à lire pour celles et ceux qui ne comprendraient pas : y-en-a-t-il encore really?!) étant devenue une bibliothèque à part entière, il était temps d’en extraire un et de me plonger enfin dans celui-ci en particulier, d’autant plus après que Martine alias Plaisirs à cultiver m’ait parlé du « Mois anglais » qui s’achève le 30 juin prochain (je m’y prendrai à l’avance en 2020, promis !).
Ce livre fut un p’tit délice accompagné de tasses d’un excellent Earl Grey !
Classé dans les « Cosy Mysteries » (catégorie que je valide même si je déteste les étiquettes dans l’absolu mais celles-ci sont nécessaires pour s’y retrouver sur un blog), vous vous délecterez comme il se doit de l’atmosphère campagnarde anglaise du Yorkshire et des personnages auxquels on s’attache rapidement. L’intrigue est simple mais vous fera passer quoi qu’il en soit un excellent moment.
Je me suis offert le deuxième tome des « enquêtes de Samson et Delilah » lors de mon passage à Saint Maur en Poche samedi. Julia Chapman avec qui j’ai pu discuter est, ce qui ne gâche rien, absolument adorable.
« Quand Samson O’Brien débarque sur sa moto rouge à Bruncliffe, dans le Yorkshire, pour y ouvrir son agence de détective privé, la plupart des habitants voient son arrivée d’un très mauvais oeil. De son côté, Delilah Metcalfe, génie de l’informatique au caractère bien trempé, tente de sauver de la faillite son site de rencontres amoureuses. Pour cela, elle décide de louer le rez-de-chaussée de ses locaux. Quelle n’est pas sa surprise quand son nouveau locataire se révèle être Samson – et qu’elle découvre que son entreprise porte les mêmes initiales que la sienne ! Les choses prennent un tour inattendu lorsque Samson met au jour une série de morts suspectes dont la piste le mène tout droit… à l’agence de rencontres de Delilah ! »
A mon libraire je m’entends encore demander Avez-vous toujours le Ponthus LE Ponthus Un premier roman Et déjà un classique
Les pensées d’un homme simple Les pensées d’un ouvrier Les pensées d’un sans dent Les pensées d’une personne du peuple Dans sa manière la plus circonstanciée
Sa relation au travail Sa relation avec les autres Sa relation avec sa femme Sa mère aussi
Le travail à la chaîne Les conversations Les attitudes Les grèves Le management La fatigue Le corps meurtri La maladie Les missions à la petite semaine L’attente des paiements
Chers hommes politiques Si ce n’est pas déjà fait Ayez le courage et la volonté de lire ce livre Vous pourrez certainement enfin comprendre Ce qu’une grande majorité de Français vivent au quotidien Bien loin de toutes les dorures de la République
Parce qu’à l’usine il ne faut pas croire On peut y croiser des écrivains Guillaume Apollinaire, Georges Perec Des chanteurs aussi Barbara, Trénet, Nougaro, Brel, Vanessa Paradis Et des poètes Léo Ferré Pour ne citer qu’eux
Pas de ponctuation pour mieux comprendre ce qu’est la répétition Des vers libres comme un pied de nez Beauté tragique d’une époque devenue complètement folle Ou comment la Littérature peut sauver de tout
« À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus. C’est l’histoire d’un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c’est qu’il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d’Apollinaire et les chansons de Trenet. C’est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l’odeur de la mer. Par la magie d’une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de bœufs et des tonnes de bulots comme autant de cyclopes. »
Line Papin a 23 ans. Vous avez bien lu : 23 ans ! Et trois romans à son actif.
Si je n’ai pas encore lu les deux précédents (lacune que je comblerai dès que possible), c’est le titre (très fort) tout d’abord qui m’a interpelée et son passage à La Grande Librairie qui m’a conduite irrésistiblement chez un de mes libraires de quartier.
23 ans…
Quelle beauté, quelle force dans son écriture ! Et quel style mon Dieu ! Cette fille est incroyable, surprenante, bluffante. Il est vraiment difficile de s’arrêter à un seul qualificatif (lisez-la, essayez et on en reparle).
Alors oui forcément, un lieu en particulier ne pouvait que me parler : l’Asie du Sud-Est, endroit de la planète que je chéris tant. En l’espèce, le Vietnam. Je ne suis pas reliée à ce continent par mes origines. Je le suis par le coeur. Mais cela ne suffisait pas pour me convaincre, comme seul l’avis de François Busnel malgré tout le respect que je lui dois.
L’histoire, celle de l’écrivain, est posée sur le papier qui sent bon l’encre fraîche (le livre est paru en mai 2019). Subtile et pudique : son côté asiatique. Avec force et une plume sublime, terriblement percutante : son côté Français.
Un sang mêlé, pour mieux habiter le monde et la Littérature.
« Le pied droit sur l’un, le pied gauche sur l’autre »
Dans les pas de son pays d’origine. Dans les pas de sa famille. Dans ses pas. Des os. Ses os en forme de plume. Ses mots.
Grâce à son talent de conteuse , les pages nous livrent l’histoire du Vietnam depuis 1946 et celle des femmes qui ont jalonné son jeune parcours. L’Histoire dans l’histoire : une magnifique imbrication !
De sa double culture, l’écrivain essaie de répondre à des interrogations légitimes comme le déracinement et l’identité (« Pourquoi être partis ? », « Ne plus se sentir chez soi », « Se sentir étrangère ».)
C’est l’histoire d’une petite fille que l’on a déracinée sans lui demander son avis. Elle. Et ses os. Ces os sur lesquels elle a failli y laisser sa peau.
« La petite fille exilée dû avoir recours à beaucoup d’imagination. (…) Mais déjà quelque chose mourait en elle : la joie »
Anorexie. Douloureux sujet qu’elle évoque à la fois d’une manière très intense mais aussi avec une incroyable retenue.
« Rien ne fonctionnait plus dans cet organisme en guerre » « Elle avait froid et mal »
C’est l’histoire d’une maladie d’amour pour une terre, une ville, une maison, des personnes…
Hanoï, la région tourangeaise, Paris… Des os que l’on a trimballés, sans se soucier de qui les compose.
« Elle avait quinze ans, et les bleus en héritage, les os en héritage, la mort en héritage »
C’est l’histoire d’un amour pour la Littérature qui lui a fait « accepter » une hospitalisation nécessaire…
« Elle me sauve la vie, elle occupe mon temps, elle m’extrait de ma guerre un instant »
Quelques allers-retours aux sources plus tard, c’est l’histoire d’une jeune femme à la recherche des failles, des interstices. Pour mieux comprendre. Pour mieux se comprendre. Pour mieux retrouver les siens. Pour mieux se retrouver. Pour mieux se libérer. Ou comment partir, pour mieux revenir…
Line Papin signe ici un livre personnel, intime mais également universel quant aux sujets abordés. Passer du « elle » au « tu » au « je » contribue à la force dramatique du récit roman et lui confère une maturité, une distance brillamment orchestrée.
Ce livre est un cri, le sien, jusqu’à ce qu’elle retrouve la faim de la vie.
« Les os des filles » est un énorme coup de coeur. Je recommande vivement sa lecture.
« Tu avais dix-sept ans alors, à peine, et tu as pris l’avion, seule, pour retourner à Hanoï. Tu vois, j’en ai vingt-trois aujourd’hui, et je retourne, seule, une nouvelle fois, sur les lieux de ton enfance. Tu es revenue et je reviens encore, chaque fois derrière toi. Je reviendrai peut-être toujours te trouver, trouver celle qui naissait, celle qui mourait, celle qui se cherchait, celle qui écrivait, celle qui revenait. Je reviendrai peut-être toujours vers celle qui revenait, vers les différents coffrets d’os, vers les couches de passé qui passent toutes ici. »