« La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert » : de Joël Dicker à Jean-Jacques Annaud…

En 2012, le livre a connu un tel succès lors de sa parution que j’ai refusé de le lire de crainte d’être déçue.
Je nage en effet trop souvent à contre-courant dans ces cas-là…

Et puis le livre est devenu « un film de 10h », une mini-série de Jean-Jacques Annaud diffusée récemment.
Les deux premiers épisodes ont débarqué à la TV un soir de semaine où j’étais seule à la maison. Appréciant le réalisateur, je me suis dit « pourquoi pas ? ».
Je me souviens m’être arrêtée en plein milieu du deuxième au retour de Mon Brun à qui j’ai commencé à raconter l’histoire dans laquelle j’étais bien rentrée. J’ai dû lui dire un truc du style « je crois que cela te plairait mais tu vas refuser d’attendre sa diffusion chaque semaine ». Du coup nous avons pris notre mal en patience et avons enregistré lesdits épisodes que nous avons dévorés en deux soirs !
Mais de mon côté, je n’ai pas pu attendre pour connaître la fin… Dès le lendemain de ce fameux soir, je suis allée chez mon libraire pour m’offrir le livre…

D’une fidélité absolue aux lignes de Joël Dicker, Jean-Jacques Annaud en a fait une réalisation extrêmement léchée.
L’atmosphère cinématographique est telle que je l’imaginais à la lecture, les personnages très travaillés font que vous vous posez des tonnes de questions sur eux tout au long de l’histoire et qu’ils deviennent au fur et à mesure des suspects idéaux jusqu’au rebondissement final qui est machiavélique à souhait !

Les différentes temporalités donnent un vrai souffle au roman (et par voie de conséquence à l’adaptation) et même si on peut relever quelques petits défauts d’écriture et de propos redondants, le tout est diablement efficace.
En filigrane, des réflexions plus qu’intéressantes sur la Littérature, les Médias et la Justice sont à relever.

Alors pour celles et ceux qui ne l’auraient pas lu, vu, faites comme moi et n’hésitez pas un instant !
Il est franchement très difficile de ne pas succomber…

Note de l’éditeur (Editions De Fallois Poche) :

« À New York, au printemps 2008, alors que l’Amérique bruisse des prémices de l’élection présidentielle, Marcus Goldman, jeune écrivain à succès, est dans la tourmente: il est incapable d’écrire le nouveau roman qu’il doit remettre à son éditeur d’ici quelques mois.

Le délai est près d’expirer quand soudain tout bascule pour lui: son ami et ancien professeur d’université, Harry Quebert, l’un des écrivains les plus respectés du pays, est rattrapé par son passé et se retrouve accusé d’avoir assassiné, en 1975, Nola Kellergan, une jeune fille de 15 ans, avec qui il aurait eu une liaison.

Convaincu de l’innocence de Harry, Marcus abandonne tout pour se rendre dans le New Hampshire et mener son enquête. Il est rapidement dépassé par les événements: l’enquête s’enfonce et il fait l’objet de menaces. Pour innocenter Harry et sauver sa carrière d’écrivain, il doit absolument répondre à trois questions : Qui a tué Nola Kellergan? Que s’est-il passé dans le New Hampshire à l’été 1975? Et comment écrit-on un roman à succès? »

« Des Mots de Contrebande, (aux inconnus qui comme moi…) » d’Alain Cadéo…

Voilà.
Il est 1h21.
Plus aucun bruit si ce n’est la douce respiration des poilus à mes côtés.
Je viens de refermer « Des Mots de Contrebande, (aux inconnus qui comme moi…). Quel titre sublime !

Alain Cadéo est un grand homme de Lettres comme on n’en a malheureusement plus beaucoup.
Alain Cadéo, c’est notre nouveau Cyrano !

Ces lignes se prêteraient à des lectures par l’écrivain lui-même dans un théâtre, une librairie, un salon de thé…
A bons entendeurs !

Au-delà des mots, nous sommes à mes yeux en présence de la langue française dans toute sa splendeur. Celle que j’aime et qui a construit la personne que je suis.

Avec ce recueil de billets le lecteur entrera dans l’intimité d’un écrivain, ce qui fait son essence, son encre…
Il plongera dedans comme il le souhaite : soit de manière très policée les uns après les autres, soit de manière désordonnée ou plutôt choisie en fonction de ses envies.
Et surtout il les laissera infuser, comme il se doit.
Il fera aussi attention à ce qui est en italique, si poétique pour peu que l’on se prête au jeu d’assembler les morceaux…

Les mots et leurs significations.
Les mots et leurs sens.
Les mots et leurs conséquences.
Les mots et leurs comportements.
Les mots et leurs silences.
Les mots et leur beauté.

C’est un objet rare et donc précieux que l’on a entre ses mains, un de ces livres de chevet dont on s’imprègnera, encore et toujours et qui ne cessera jamais de nous accompagner.

Alain Cadéo est un magnifique passeur de réflexions, d’émotions.
A nous de savoir les recevoir, les faire vivre, les partager, les transmettre.

Belle lecture à tous !

Note de l’éditeur (La Trace) :

« Ces petits mots, ces intentions, ces billets, sont destinés à celles et à ceux qui, ne se connaissant pas, font partie de la même famille éparpillée : les affamés d’azur.

Nous, mendiants de la lumière, tendant la main pour des piécettes de partage, menue monnaie de notre joie, ce que nous cherchons c’est de pouvoir, sans aigreur ni amertume, poursuivre notre quête, nous rassembler autour des « mots de la tribu ».

Là, dans la caverne aux mille reflets de nos têtes, devant un bon brasier de phrases crépitantes, compagnons retrouvés nous tenant chaud, enfin ne nous ne serons plus seuls… »

« Aucune pierre ne brise la nuit » de Frédéric Couderc…

Ce livre revient sur les années les plus sombres que l’Argentine ait connue : les vols de bébés des opposants politiques (avant qu’ils ne soient eux-mêmes exécutés pour la plupart) lors de la dictature militaire, c’est-à-dire entre 1976 et 1983, et adoptés par des personnes non scrupuleuses souvent haut placées.
Une scandale d’Etat. Un génocide. Une honte inexcusable pour une partie du pays.

Grâce au travail des Grands-Mères de la place de Mai près de 130 enfants à ce jour ont renoué leurs liens de parenté sur les 500 (estimés) qui ont subi ce sort.

Frédéric Couderc s’est plongé dans ces évènements historiques aussi fascinants qu’écoeurants en écrivant un texte à la quête identitaire et au souffle romanesque intense qui maintiennent le lecteur en haleine.
On s’attache en effet très vite aux personnages dont on veut tout savoir, tout comprendre.

Et je n’en dirai pas plus afin de ne rien dévoiler de ce qui fait le charme certain de ce roman (malgré l’horreur entre les lignes pour celles et ceux qui comme moi s’étaient déjà documentés sur le sujet en amont).

Belle lecture à tous !

« Il est parfois des êtres qui sont poussés l’un vers l’autre.
Ils se reconnaissent d’instinct et rien n’est plus comme avant »

« Incroyable comme les épreuves d’une vie
peuvent changer une personne du tout au tout »

Note de l’éditeur (Héloïse d’Ormesson) :

« Dans un musée du Havre, la rencontre entre Gabriel et Ariane n’aurait pas dû avoir lieu – lui le réfugié argentin, elle la femme de diplomate. Mais devant la mystérieuse toile d’un peintre de Buenos Aires, les fantômes du passé ressurgissent, tout comme les ombres de la passion. À l’heure où les enquêtes sur les trente mille disparus sous la dictature reprennent, chacun s’embarque alors dans une quête où la vérité menace d’être plus dévastatrice encore que le mensonge… »

NDLR. Si l’Argentine vous passionne, vous pouvez également lire le très beau livre « La ligne bleue » de Ingrid Bétancourt.

« Fille du silence » de Carole Declercq…

Ce livre, j’ai eu le bonheur de le lire en octobre dernier.
C’était alors encore un manuscrit, et il s’appelait « Je n’ai pas d’âge ».

Après « Ce qui ne nous tue pas… » et « Un autre jour pour mourir » , Carole Declercq signe là son troisième roman qu’elle a écrit « avec les tripes » comme elle le dit et cela se sent.

Il a fait l’objet de ma part d’une lecture attentive d’une traite et de huit feuilles de notes, ce qui n’est pas si fréquent.
Ce personnage (Rita Atria) qui a inspiré le film « La sicilienne » a existé et était digne d’un roman, assurément.
Je ne veux pas trop en dire pour ne pas déflorer l’histoire, mais cette jeune femme est fascinante, captivante.
L’écrivain s’en est emparé et lui donne vie d’une manière magistrale !

Cri d’amour pour sa terre la Sicile Rina, grâce à la plume de son auteur, a le don de nous faire humer le pays, autant pour les douceurs qu’il peut offrir que dans les horreurs qu’il a subi.
Les souvenirs, la famille, la transmission, la Cosa Nostra, les assassinats, les sacrifices, la justice, des juges extraordinaires (Falcone et Borsellino)…
On vit tout au long des pages le cheminement d’un témoin de premier ordre.

Une tragédie d’une force inouïe servie par une écriture qui s’affirme incontestablement.
Carole Declercq ne fait plus qu’un avec Rina, l’île et tout ce qui fait ces lignes incroyables.
J’ai littéralement ADORÉ !

Paru le 16 mai dernier, je vous le recommande vivement.
Plusieurs mois après sa lecture, ce livre m’habite toujours. Et je prends les paris que ce sera le cas pour vous aussi.

Belle lecture à tous !
Il mérite une belle place dans le paysage littéraire. A bons entendeurs…

Note de l’éditeur (Terra Nova) :

« Sous le soleil de plomb sicilien, Rina a vécu une enfance pleine de violence et de non-dits dans une famille différente des autres. Une famille gangrenée par la mafia, où les hommes disparaissent parfois mystérieusement, où la plupart des femmes sont veuves ou orphelines. Lorsque le père de Rina, le « parrain » du village, est assassiné, le monde de l’adolescente s’effondre complètement. Doit-elle vraiment se résigner et accepter son destin, comme sa mère le lui demande ? Et son frère, le seul homme encore vivant de sa famille, finira-t-il lui aussi enterré dans un terrain vague ? Pour Rina, c’est hors de question. Alors, elle va mener sa propre vendetta. En brisant la loi du silence, elle va s’attaquer au fragile équilibre qui avait jusqu’alors cimenté son existence. Au risque de faire voler en éclats sa vie et celle de sa famille…

Pour échapper à son destin, elle est prête à tous les sacrifices. »

« My absolute darling » de Gabriel Tallent…

Se plonger dans un coup de coeur de François Busnel cautionné par Stephen King, le Harper’s Bazaar et The New York Times, ça fiche un chouille la trouille.
Sans vouloir se prendre pour Paul Auster, ET SI jamais je n’aimais pas ?

Il ne nous appartient pas, à nous lecteurs me semble-t-il, de juger le comportement de Martin et de Turtle.
Ce sont des personnages de fiction.
L’écrivain nous conte une histoire sans lui-même jamais prendre partie.
Il nous dresse le portrait d’une Amérique « profonde » et relate l’histoire de personnes “normales” qui commettent des choses complètement dingues.

De fait, on peut apprécier les « characters » comme diraient les anglo-saxons  malgré ce qu’il se passe parce que superbement travaillés.
La force de la plume de Gabriel Tallent est en effet impressionnante pour un premier roman.

Son écriture est une photographie, une peinture qui dissèque, dans les moindres détails.
Les descriptions sont très cinématographiques.

Roman sur la renonciation, la liberté par-dessus tout, c’est une véritable tempête dans le milieu littéraire, un coup de poing époustouflant qui ne peut pas laisser indifférent.

L’atmosphère est lourde et parfaitement rendue.
J’ai dû parfois arrêter ma lecture pour cause de mal être parce que très réaliste.

Nous ne sommes pas prêts d’oublier Turtle (ni Martin d’ailleurs), élevée à la dure, survivante de tout même du plus horrible.
La situation préoccupe, fascine, interpelle.
Ou le combat d’une jeune femme pour exister comme elle l’entend

La douleur, l’indépendance, la liberté, la féminité, l’inceste, la société, les armes, la nature sauvage (en dehors du contrôle des hommes), la violence, l’ambivalence humaine
Voici ce à quoi nous sommes confrontés.

Roman psychologique, initiatique, noir, très « américain » dont je refuse de vous déflorer quoi que ce soit, c’est un livre troublant, bouleversant, aussi dérangeant qu’addictif. Un livre INCROYABLE, d’une maturité folle !

30 ans.
8 ans d’écriture.
Retenez bien ce nom.

Alors oui François Busnel, vous avez eu raison de le mettre à ce point en avant.

LISEZ-LE !
Vous comprendrez ainsi pourquoi on met parfois une majuscule à ce beau mot qu’est Littérature (fonctionne aussi en anglais).

Note de l’éditeur (Gallmeister) :

« À quatorze ans, Turtle Alveston arpente les bois de la côte nord de la Californie avec un fusil et un pistolet pour seuls compagnons. Elle trouve refuge sur les plages et les îlots rocheux qu’elle parcourt sur des kilomètres. Mais si le monde extérieur s’ouvre à elle dans toute son immensité, son univers familial est étroit et menaçant : Turtle a grandi seule, sous la coupe d’un père charismatique et abusif. Sa vie sociale est confinée au collège, et elle repousse quiconque essaye de percer sa carapace. Jusqu’au jour où elle rencontre Jacob, un lycéen blagueur qu’elle intrigue et fascine à la fois. Poussée par cette amitié naissante, Turtle décide alors d’échapper à son père et plonge dans une aventure sans retour où elle mettra en jeu sa liberté et sa survie. »

A noter la bonne traduction de Laura Derajinski.

Le livre a paru en 2017 aux Etats-Unis.

Merci aux Editions Gallmeister (que j’ai découvertes par ce biais) d’avoir gardé le titre original. Ce n’est pas si fréquent et j’en redemande !