Catégorie : Lectures

  • « Le dernier gardien d’Ellis Island » de Gaëlle Josse…

    « Le dernier gardien d’Ellis Island » de Gaëlle Josse…

    Ellis Island fait partie des rares endroits lors de ma découverte de New York qui m’a particulièrement touchée historiquement parlant.
    Je n’ai jamais rien écrit dessus, mais nul doute que si j’avais eu un blog à l’époque j’aurais couché sur le clavier ce que j’avais ressenti en la visitant.

    « C’est par la mer que tout est arrivé »

    Les lignes nous rendent spectateur, témoin d’une époque heureusement révolue (mais non moins tragique autrement malheureusement).
    L’écrivain nous ancre au port…

    « L’île de l’espoir et des larmes.
    Le lieu du miracle, broyeur et régénérateur à la fois »

    Gaëlle Josse donne voix (directement ou non) à toutes les personnes qui sont passées sur l’île en en faisant une critique nécessaire parce que factuelle (on imagine aisément le travail de documentation avant l’écriture du livre).
    Les souvenirs se fracassent sur les thèmes de l’exil, la solitude, les rêves, les espoirs, les déceptions…

    Elle le fait avec toute la bienveillance et la douceur qui la caractérise, sans omettre néanmoins d’aborder tout le tragique du lieu, des murs, du sol que l’on peut désormais fouler en « touriste ».

    Belle lecture à tous !

    Editions J’ai Lu 

    New York, 3 novembre 1954. Dans quelques jours, le centre d’immigration d’Ellis Island va fermer. John Mitchell, son directeur, resté seul dans ce lieu déserté, remonte le cours de sa vie en écrivant dans un journal les souvenirs qui le hantent : Liz, l’épouse aimée, et Nella, l’immigrante sarde porteuse d’un très étrange passé. Un moment de vérité où il fait l’expérience de ses défaillances et se sent coupable à la suite d’événements tragiques. Même s’il sait que l’homme n’est pas maître de son destin, il tente d’en saisir le sens jusqu’au vertige.

  • « Les jonquilles de Green Park » de Jérôme Attal…

    « Les jonquilles de Green Park » de Jérôme Attal…

    « Si la guerre doit durer une éternité,
    je voudrais juste pouvoir vivre jusqu’au mois d’avril.
    Pour voir, une fois encore, les jonquilles de Green Park.
    Elles se tiennent ensemble, chaque saison.
    Belles et fières dans le vent puissant et douloureux d’avril.
    Comme nous autres en ce moment. »

    La guerre 39-45 vue différemment, avec une certaine dose d’humour et de poésie…

    Ou comment s’emparer du tragique pour se l’approprier le plus positivement possible.
    L’insouciance face à la réalité, cette « bulle protectrice » qu’est la liberté par-dessus tout.

    « Je ne désirais qu’une chose :
    rester môme le plus longtemps possible parce que, j’en étais certain,
    il n’y avait pas de plus grand bonheur que d’avoir un chez soi
    et d’être dans sa chambre,
    et que votre mère vienne vous border,
    et qu’elle vous autorise à lire une dernière page de votre BD de Superman,
    et qu’ensuite elle revienne vous border »

    Ce livre m’a fait penser à l’atmosphère du film « La vie est belle » de Roberto Benigni que j’avais ressentie et aimée en son temps (1998).
    Il dépoussière le sujet et insuffle un vent d’optimisme qui fait du bien.

    Pour fêter Noël d’un autre temps autrement…
    Un bien joli cadeau assurément…

    Belle lecture à tous !

    Editions Laffont

    Septembre 1940. Tommy vit avec ses parents et sa grande soeur Jenny. C’est le début des bombardements allemands sur Londres. Ils se préparent tout de même à fêter Noël.
    Tommy et ses copains se passionnent pour les super-héros : Superman, Buck Rogers et… Winston Churchill. L’aventure ne serait pas la même sans deux petites frappes : Nick Stonem et Drake Jacobson, aussi vilain que sa jumelle, Mila, est belle.
    Dans un Londres en lambeaux, ces jeunes adolescents vont se créer leurs propres histoires et se perdre dans les brumes et le fracas d’une ville enflammée. Mais fêter Noël et revoir les jonquilles en avril restent la plus belle des résistances.

  • « Conversations avec mon chat » d’Eduardo Jauregui…

    « Conversations avec mon chat » d’Eduardo Jauregui…

    « Imitons les animaux : manger, dormir, jouer et aimer »

    Parlons peu mais parlons bien : ce livre est un feel good, un véritable page turner.
    Mais il est loin d’être idiot !

    Des chats nous avons BEAUCOUP à apprendre, je ne le répèterai jamais assez même sans vouloir faire de psychologie de bas étage.

    Ces lignes sont un hymne au relâchement, au bien-être, à la pleine conscience, à la lecture et j’en passe…

    N’y cherchez rien d’autre et prenez juste du plaisir.
    Entre deux livres sérieux cela fait du bien, tout simplement. Et vous en retirerez forcément quelque chose de positif.
    À lire en étant accompagné(e) d’un p’tit carnet de notes, d’un crayon et d’un chat (évidemment)…

    Belle lecture à tous !

    Editions Presses de la Cité

    Sara a presque quarante ans et des tas de problèmes… jusqu’au jour où elle rencontre un chat qui parle.

    Chaque matin, Sara se réveille avec la nausée. Enceinte ? Impossible, cela fait bien trop longtemps que son compagnon ne l’a pas approchée. Surmenée ? Plus probable. D’ailleurs, le matin même où elle doit présenter un dossier important au travail, elle se met à avoir des hallucinations : Sybille, un drôle de chat abyssin, vient frapper à sa fenêtre et lui parle. Et pas pour dire n’importe quoi ! L’animal lui pose des questions étonnamment sensées : est-elle vraiment heureuse ? Qu’attend-elle de la vie ? La psychatnalyse commence !

  • « L’animal et son biographe » de Stéphanie Hochet…

    « L’animal et son biographe » de Stéphanie Hochet…

    J’ai lu ce livre il y a plusieurs mois de cela mais je m’en souviens comme si c’était hier…

    Décortiquer les romans de Stéphanie Hochet n’est pas chose aisée tellement les thèmes abordés sont nombreux.
    Qui plus est lorsque le fantastique s’en mêle !

    Au-delà d’une réflexion assez cynique sur l’écrivain (sa condition, ses routines…), elle évoque ici un sujet cher à son coeur  : l’homme et l’animal.

    « L’écriture doit permettre de retrouver l’animal qui existe en soi »

    Manipulée, vampirisée, chassée, traquée… elle a particulièrement étudié l’être humain, dans toute sa bestialité et nous offre un texte tout aussi pervers, machiavélique que fascinant, intelligent.
    Elle jongle admirablement bien entre la réalité et la fiction, mettant parfois le lecteur dans une position d’inconfort des plus intéressantes.

    Roman très actuel aux multiples tiroirs où la mythologie, l’écologie et le féminisme se côtoient, l’écrivain pose la question en filigrane ô combien importante de l’influence de la littérature sur nos comportements.

    « Les écrivains rêvent d’écrire un texte qui transforme le réel ».

    Belle lecture à tous !

    Editions Rivages

    Une romancière est invitée à un festival littéraire dans le sud de la France. Elle parcourt l’arrière-pays de Cahors et présente ses livres dans des campings. Après un séjour étrange dans une maison isolée en pleine campagne, elle finit par rencontrer un personnage important de la région : le maire de la ville de Marnas, Vincent Charnot. Plus qu’un maire, Charnot est une sorte de gourou, un illuminé qui voudrait marquer son époque avec des projets culturels transgressifs. Il commande alors à la romancière un texte sur un sujet saugrenu : la « biographie » d’une espèce disparue depuis plusieurs siècles, l’aurochs, animal préhistorique emblématique des chefs-d’œuvre de l’art pariétal, qui a fasciné les nazis, lesquels tentèrent en vain de le « ressusciter ». Vaincue par les arguments du maire et les aurochs qui lui sont donnés à voir dans le plus grand secret, l’écrivain se met à écrire. Elle devient vite le rouage d’une machination qui la dégoûte autant qu’elle la fascine.

  • « Tango fantôme » de Tove Alsterdal…

    « Tango fantôme » de Tove Alsterdal…

    Note de l’éditeur :

    Durant la nuit de Walpurgis, cette nuit de la fin avril où l’on fait brûler des feux pour dire adieu à l’hiver, une femme est tombée d’un balcon, du onzième étage. C’était Charlie, la sœur d’Helene Bergman, mais depuis des années elles ne se parlaient presque plus. Helene n’avait jamais partagé l’obsession de son aînée : découvrir ce qu’il était arrivé à leur mère, disparue en novembre 1977, quelque part en Amérique du Sud. De cette Ing-Marie si belle, il ne reste plus que quelques photographies et le souvenir de ceux qui l’ont aimée. Mais tandis que la police s’apprête à classer la mort de Charlie comme un banal suicide, Helene se dit qu’elle aurait dû révéler certaines choses. Au bout de ces omissions, elle va devoir conduire elle-même une étrange enquête. Pas sur une mort, mais sur deux. Pas seulement sur sa sœur, mais aussi sur sa mère. Pas seulement en Suède, mais aussi en Argentine.

    Une intrigue très bien ficelée, aux personnages captivants et une histoire dans l’Histoire puisque l’auteur nous plonge entre autre dans l’Argentine sous la dictature militaire (période qui me « fascine » depuis que j’ai lu « La ligne bleue » d’Ingrid Bétancourt).

    J’ai été touchée par la quête d’Hélène qui fait tout voler en éclats pour comprendre le parcours caché de sa mère ainsi que celui de sa soeur…

    Belle lecture à tous !

    Editions Le Rouergue Noir

    Livre lu dans le cadre du Jury du Grand Prix des Lectrices ELLE 2018 dont je fais partie !

  • « Ces rêves qu’on piétine » de Sébastien Spitzer…

    « Ces rêves qu’on piétine » de Sébastien Spitzer…

    Ce que je connaissais de Magda Goebbels ? Sa position de femme influente du IIIe Reich et surtout son adoration telle pour Hitler qu’elle a tué ses propres enfants avant de se donner la mort avec son mari dans le bunker du Führer.

    C’est par le biais de certaines atrocités que l’on devient un personnage de roman comme celui que propose Sébastien Spitzer, journaliste de son état…

    Cela étant dit, nous sommes bien loin d’un énième livre sur le sujet ou la période grâce à la construction astucieuse choisie : les destins croisés de juifs (parmi eux, le « presque » père qui l’a élevée) et la fin inéluctable des nazis dont fait partie Magda, Médée moderne (la fille qui a voulu l’oublier sur l’autel des folles idées qu’elle soutenait).

    Là où l’écrivain fait fort, c’est qu’il arrive à maintenir une intensité particulière alors que l’écriture est sobre, voire même douce.
    La psychologie des personnages est fouillée, le fond des lignes extrêmement documentées.
    Et nous, lecteurs, nous nous glissons dans les voies inexorables dans lesquelles nous entraîne l’auteur…

    Pour un premier roman, c’est un coup de maître !

    Editions de L’Observatoire

    Sous les bombardements, dans Berlin assiégé, la femme la plus puissante du IIIe Reich se terre avec ses six enfants dans le dernier refuge des dignitaires de l’Allemagne nazie. L’ambitieuse s’est hissée jusqu’aux plus hautes marches du pouvoir sans jamais se retourner sur ceux qu’elle a sacrifiés. Aux dernières heures du funeste régime, Magda s’enfonce dans l’abîme, avec ses secrets.
    Au même moment, des centaines de femmes et d’hommes avancent sur un chemin poussiéreux, s’accrochant à ce qu’il leur reste de vie. Parmi ces survivants de l’enfer des camps, marche une enfant frêle et silencieuse. Ava est la dépositaire d’une tragique mémoire : dans un rouleau de cuir, elle tient cachées les lettres d’un père. Richard Friedländer, raflé parmi les premiers juifs, fut condamné par la folie d’un homme et le silence d’une femme : sa fille.
    Elle aurait pu le sauver.
    Elle s’appelle Magda Goebbels.

    NDLR. J’ai lu ce livre à sa parution en septembre dernier mais il fait partie de la sélection du Grand Prix des Lectrices ELLE 2018 dont je fais partie !

  • « Même Dieu ne veut pas s’en mêler » d’Annick Kayitesi-Jozan…

    « Même Dieu ne veut pas s’en mêler » d’Annick Kayitesi-Jozan…

    Note de l’édieur :

    En kinyarwanda, « au-revoir »se dit : « Prends soin de survivre à la journée ».

    Annick Kayitesi-Jozan a survécu au génocide des Tutsis en 1994, au Rwanda. Elle avait 14 ans. Sa mère, son petit frère, une grande partie de sa famille ont été massacrés. Réfugiée en France, elle apprend au qutodien à vivre avec les morts, et avec les siens. Désormais, elle doit répondre aux questions de ses enfants. Alors, elle se souvient. Elle remonte le temps jusqu’à la cuisine pleine de suie où, pendant les tueries, elle sert de bonne aux voisins qui viennent de dénoncer sa mère.

    Sans remettre en cause ce que l’auteur a vécu, ce témoignage m’a laissée malheureusement complètement de marbre pour deux raisons principales :

    1-  je n’ai rien appris de plus sur le sujet
    2 – j’ai trouvé l’écriture très pauvre (beaucoup trop de bla-bla, doublé en plus d’un pathos insupportable à mon goût) et la construction brouillon

    Ce fût donc pour moi une lecture complètement inutile (toutes mes excuses), mais à vous de juger !

    Editions Seuil

    Livre lu dans le cadre du Jury du Grand Prix des Lectrices ELLE 2018 dont je fais partie !

  • « Crapule » de Jean-Luc Deglin…

    « Crapule » de Jean-Luc Deglin…

    Les félins ont été, sont et seront toujours un sujet d’étude passionnant.
    Preuve en est avec ce nouveau livre, proposé par Jean-Luc Deglin aux Editions Dupuis.

    A travers des dessins parsemés de couleur bleu sur fond noir et blanc, entre ronrons, doux coussinets, coups de griffes, morsures et câlins, Crapule et son humaine vont apprendre à se connaître et à s’apprivoiser en donnant lieu à des situations drôles et cocasses teintées d’humour noir et parfois un peu amères.

    C’est que la vie avec un chat (ou plus) n’est pas toujours aisée !

    On sent que l’écrivain, mâle de son état, a assurément bien étudié le comportement de sa muse féline, qu’il n’oublie d’ailleurs pas de remercier.

    Ce que j’ai apprécié ?
    On se sent comme au théâtre !
    Chacun pourra retrouver ce qui fait le charme (ou pas) de son poilu dans les mises en scène choisies fort à propos.
    On rit (beaucoup) et on le relit pour bien capter toutes les subtilités souhaitées je pense par l’auteur.

    Dernière chose fort importante : ces 128 strips ont été également chatpprouvés par Nabuchodonosor, qui a désespérément tenté de cacher le titre comme vous pouvez le voir !

    Editions Dupuis

    Un grand merci à Lecteurs.com pour cette parenthèse de lecture bien sympathique.

  • « De l’ardeur » de Justine Augier…

    « De l’ardeur » de Justine Augier…

    Cet essai est un gros coup de cœur !
    Je l’ai trouvé non seulement intéressant mais également fort émouvant et extrêmement bien écrit.

    Ce livre est une enquête sur une femme exceptionnelle, avocate spécialisée dans la défense des prisonniers politiques, journaliste et militante des Droits de l’Homme, enlevée par des islamistes intégristes avec trois autres personnes en Syrie en 2013 et depuis portée disparue.

    La première chose que j’ai faite dès les premières lignes a été de mettre un visage sur un nom.

    Absente, d’accord. Mais j’avoue avoir eu besoin qu’elle soit humainement là face à la force des mots.

    Justine Augier, qui a mis ses pas dans ceux de ce personnage extraordinaire, a le don de nous brosser le formidable portrait, complet parce que très bien documenté, de Razan Zaitouneh (« sérénité » en arabe) et en filigrane de tout un pays plongé dans le chaos le plus profond.
    Un prénom et un nom, que nous ne sommes pas prêts d’oublier…

    Belle lecture à tous !

    Editions Actes Sud

    Avocate, militante des droits de l’homme, figure de la dissidence syrienne, Razan Zaitouneh s’appliquait à documenter les crimes commis dans son pays par le régime mais aussi par les groupes intégristes, à recueillir la parole de ceux qui avaient survécu à la torture et à l’enfermement – quand, en décembre 2013, elle fut enlevée avec trois de ses compagnons de lutte. Depuis lors, on est sans nouvelles. De l’ardeur reconstitue son portrait, recompose le puzzle éclaté de la révolution en Syrie, et du crime permanent qu’est devenu ce pays.
    En découvrant son combat et son sort, Justine Augier, qui a elle-même mis à distance ses premiers élans humanitaires, est saisie par la résonance que cet engagement aussi total qu’épris de nuances trouve dans ses propres questionnements. Récit d’une enquête et d’une obsession intime, partage d’un vertige, son livre est le lieu de cette rencontre, dans la brûlure de l’absence de Razan.
    Plongée dans l’histoire au présent, De l’ardeur nous donne un accès précieux à cette réalité insaisissable dans son assassine absurdité, et si violemment parallèle à notre confort occidental peu à peu menacé. Et ce, dans un respect absolu de la dignité du langage, dans la lucidité d’une impuissance certaine et néanmoins étrangère à toute reddition.

    Livre lu dans le cadre du Jury du Grand Prix des Lectrices ELLE 2018 dont je fais partie !

    NDLR. Ce livre a reçu le Prix Renaudot Essai 2017.